Le ministre de la justice dénonce l’implication de la France
La ville de Goma dans l’Est de la RDC, frontalière au Rwanda, s’est réveillée hier mardi 28 janvier 2025 avec de fortes détonations et des échanges de tirs et l’entrée dans plusieurs quartiers des combattants du groupe armé M23, soutenus par les forces rwandaises.
Plusieurs ambassades ont été attaqués et des magasins pillés à Kinshasa. Face à cette spirale de la violence, le ministre congolais de la justice Constant Mutamba, à travers un mémorandum, a ouvertement accusé la France de complicité.
Interdit d’entrer à l’ambassade de France pour déposer son mémorandum, car n’ayant pas demandé de rendez-vous à l’avance, Constant Mutamba, ministre congolais de la justice qu’on surnomme désormais le nouveau Lumumba, n’a pas mâché ses mots, pour dénoncer la complicité de la France dans l’agression rwandaise par le M23, qui ensanglante l’Est de la RDC depuis plusieurs années : « Nous ne sommes pas obligés. Nous ne sommes pas obligés monsieur le diplomate. Nous ne sommes pas venus vous supplier pour déposer notre mémorandum. Nous ne sommes non pas venus pour chercher l’abri ici, parce que nous sommes chez nous. Nous n’avons pas du tout peur des français. Nous sommes fatigués de votre complicité. Nous sommes fatigués de votre soutien à un régime génocidaire. La France n’a eu de cesse de soutenir un pays accidentellement francophone. Vous avez donc intérêt à faire profil bas. »
Alors qu’il avait renvoyé son appel à manifester prévu pour le 27 janvier dernier, le ministre de la justice, accompagné de plusieurs jeunes, met en garde le diplomate français qui menace de ne pas prendre la note du gouvernement : « Si vous voulez nous menacer, nous allons remobiliser nos militants et les appeler davantage. Et nous dormirons ici. Et donc lorsque l’équipe dirigeante de l’opposition républicaine arrive, c’est de pouvoir la recevoir. Mais vous, vous nous recevez dehors. Et donc, c’est une déception. Au-delà de cette déception, nous voulions vous remettre ce mémorandum et espérer qu’il parviendra au destinataire ».
Au cours de ces protestations des jeunes congolais, pour dénoncer l’inaction de la communauté internationale, les ambassades de Belgique, France, Etats-Unis, Rwanda, Ouganda et Kenya ont été prises pour cible par les manifestants. Pour le politologue Christian Moleka, ceci peut être perçu comme une forme de ras-le-bol vis-à-vis d’une communauté internationale qui se refuse à sanctionner le Rwanda. « Dans la perception de l’opinion, tous ces pays de l’Est, l’Ouganda, le Rwanda, le Kenya, sont considérés comme des pays anti-RDC qui soutiennent, d’une certaine manière, la balkanisation du Congo. Après, la France est particulièrement épinglée, alors qu’au Conseil de sécurité, elle s’est positionnée du côté du Congo » remarque-t-il. « Les Etats Unis, acteurs importants du changement souhaité dans la sous-région, sont également mis à l’index parce que pour beaucoup de Congolais, les Etats-Unis ont une capacité d’action qui peut faire que la guerre s’arrête, mais, à ce stade, on se limite à des communiqués. »
En fin de journée, la situation semble s’être stabilisée à Kinshasa. Une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies à propos de la situation dans l’est de la RDC est prévue ce 28 janvier à 16h, heure de New York.
Des habitants de la capitale de la province du Nord-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo, ont gagné des camps de déplacés de l’autre côté de la frontière. À Kinshasa, des manifestants ont attaqué de nombreuses ambassades étrangères. Du côté de l’ONU, une nouvelle réunion de son Conseil de sécurité est annoncée à New York.
Une communication du président congolais est annoncée, sans précision sur le moment choisi par Félix Tshisekedi pour s’exprimer sur cette escalade dans l’est de la RDC.
Christine Babanda