Secteur Minier

0
103

Quel est l’état d’avancement de la mise en exploitation imminente des projets miniers ?

Depuis 2021, et chaque année, dans les allocutions de fin d’année et à l’attention de la jeunesse, le secteur minier occupe une place prépondérante, car le Cameroun mise désormais sur les ressources minières pour relancer son économie, stimuler son industrialisation et, surtout, créer des emplois pour les jeunes Camerounais issus des établissements de formation et des universités.

Les responsables politiques laissent entendre aux Camerounais et à la jeunesse camerounaise que la solution à leurs problèmes résidera dans la mise en production de certains projets de fer, de bauxite et d’or marginaux, qui sont loin de rivaliser avec les standards internationaux, à l’instar du projet de fer de Belinga au Gabon, de Simandou en Guinée Conakry, lesquels sont développés par des multinationales de renom telles que Fortescue et Rio Tinto. Au Cameroun, des conventions minières ont été signées avec des spéculateurs dépourvus de capacités techniques et financières avérées, tels que Canyon Resources, Jindal, G stone, Sinosteel, Jindal, Oriole Resources, Caminco, etc.

En effet, le Cameroun n’est pas un pays doté d’abondantes ressources minières, avec de modestes gisements d’or, de diamant, de nickel-cobalt, de bauxite et de fer découverts depuis l’époque coloniale. L’industrie minière au Cameroun est rudimentaire, sa contribution au budget national étant inférieure à 1 %. Cependant, en dépit de notre potentiel minier limité, l’industrie minière au Cameroun est confrontée à de nombreux défis, notamment en termes de gestion environnementale et sociale, ainsi qu’en matière de gouvernance. Cet article se propose d’examiner l’état actuel des projets miniers au Cameroun et les perspectives d’avenir pour ce secteur, d’analyser les défis et les enjeux qui s’y rattachent, de présenter la politique minière et la réglementation en vigueur, et enfin de formuler des perspectives et des recommandations pour une amélioration de la gestion des ressources dans l’industrie extractive.

État actuel des projets miniers au Cameroun et perspectives d’avenir

Au Cameroun, quelques projets miniers ont par ailleurs déjà été officiellement lancés sans avancées significatives sur le terrain, notamment le projet d’exploitation du fer de Lobé-Kribi (réserves estimées à 632,82 MT à 33 % de fer), celui de Bipindi-Grand Zambi (réserves estimées à 150 MT à 30 % de fer), de Mbalam (réserves estimées à 122 MT à 62 % de fer), sans oublier le projet d’exploitation d’or de Colomine (réserves estimées à 1 867 kg d’or métal). Le gouvernement camerounais, dans l’optique d’accroître son développement économique national, a prévu de lancer un ensemble de projets miniers répartis selon qu’ils soient à court terme, à moyen terme ou à long terme ; à l’instar notamment des projets miniers à court terme (lancés en 2024) de cobalt-nickel dans la localité de Nkamouna (réserves estimées à 68,132 MT à 0,26 % de cobalt, 0,66 % de nickel et 1,48 % de manganèse), du minerai de fer à Nkout (réserves estimées à 25 MT à 60 % de fer et 2,7 MrdT à 32 % de fer), d’or à Mborguéné (réserves estimées à 7 554,44 kg d’or métal), et du minerai de fer de Ngovayang (réserves estimées à 239 MT à 35 % de fer).

Des projets à moyen terme du minerai de fer de Ntem (réserves estimées à 96,9 MT à 34 % de fer), d’exploitation d’or de Bibemi (réserves estimées à 35 000 oz d’or métal), et le projet d’exploitation de rutile d’Akonolinga (réserves estimées à 1 MT) sont des projets susceptibles de démarrer entre 2025 et 2026.

À ces projets s’ajoutent, sur le long terme, l’exploitation de bauxite dans les localités de Mini-Martap et Fongo Tongo (réserves estimées respectivement à 99,1 MT à 51,6 % de Al2O3 et 46 MT à 47 % de Al2O3), l’exploitation de calcaire de Mintom (réserves estimées à 540 000 000 m3 à 45 % de CaO) et de cassitérite du Mayo Darlé (réserves estimées à 1,6 MT à 0,35 SnO2), qui sont des projets susceptibles de démarrer au-delà de 2026.

De plus, pour l’ensemble des projets miniers au Cameroun, plusieurs permis ont été élaborés, soit un total de 159 permis, dont 150 permis de recherche et 9 permis d’exploitation, répartis entre les minerais de fer, d’or, de bauxite, de cassitérite, de rutile/ilménite, de nickel/cobalt/manganèse, de cuivre, lithium et calcaire/marbre.

Quel est l’état d’avancement des projets officiellement lancés ?

L’analyse de l’ensemble des projets susmentionnés, qu’ils soient à court ou moyen terme, révèle une situation décevante et prévisible, car la mise en production d’un projet minier ne saurait être décrétée. Les promesses politiques se sont avérées constamment décalées par rapport à l’état d’avancement réel des projets miniers. À ce jour, l’« Or de Colomines » est exploité de manière artisanale et semi-mécanisée, et en termes d’emplois, ces exploitations n’offrent aucune perspective à nos ingénieurs des mines et géologues camerounais. Le projet de Grand Zambi, quant à lui, a accouché d’une réalisation insignifiante. M. Bougne (Bocom), qui ambitionnait de faire de cette mine un projet intégré avec une unité moderne de transformation locale de toute la production en fer à béton pour concurrencer Fokou, se trouve aujourd’hui en train de vouloir exporter l’intégralité du minerai de fer qui sera extrait de la mine. Pire encore, le transport de ce minerai s’effectuera par voie routière jusqu’au port autonome de Kribi, où le terminal minéralier est encore à l’état de projet. On peut légitimement s’interroger sur la manière dont seront chargés les navires minéraliers en l’absence d’une jetée appropriée. Il s’agira vraisemblablement d’une solution de fortune, destinée à créer une illusion d’activité au début de l’exploitation et de l’exportation du minerai de fer de Grand Zambi.

Sur le terrain, à Bipindi, nous sommes confrontés à une simple carrière de fer et non à une véritable mine, sans aucun respect des normes d’hygiène, de sécurité et d’environnement, et avec des employés très mal rémunérés. Les 25 000 emplois annoncés par le ministre intérimaire pour l’ensemble des projets se sont révélés n’être que pure démagogie. Nos jeunes ingénieurs, géologues, géophysiciens, cartographes et techniciens de terrain devront donc s’armer de patience, car la perspective d’une amélioration significative est encore lointaine.

Perspectives et recommandations

Malgré les défis auxquels est confrontée l’industrie minière au Cameroun, des perspectives prometteuses se dessinent pour le développement de notre secteur minier, afin de faire du Cameroun un pays minier de premier plan et une destination attractive pour les investissements miniers. À cette fin, le gouvernement camerounais doit mettre en œuvre des politiques visant à promouvoir l’exploration et la recherche, l’exploitation responsable et fiable des ressources minières, la signature de conventions minières largement favorables au Cameroun, et adopter un nouveau code minier à même de faire de notre pays une destination minière de choix.

À cet égard, les recommandations suivantes peuvent être formulées :

    Renforcer les capacités institutionnelles et veiller à ce que les mécanismes de contrôle et de surveillance mis en place garantissent une exploitation responsable et durable des ressources ;

    Promouvoir la transparence et la redevabilité dans la gestion des ressources minières ;

    Mettre en place un comité de surveillance chargé de veiller à la bonne application des mécanismes de consultation et de participation des communautés locales aux décisions relatives aux projets miniers ;

    Élaborer des programmes de formation et de renforcement des capacités des acteurs locaux afin d’améliorer leur participation à l’industrie extractive ;

    Promouvoir les investissements dans les infrastructures et les services sociaux afin d’améliorer la qualité de vie des communautés locales ;

    Accroître les investissements dans les projets d’étude des différents gisements et faciliter l’octroi de permis pour l’extraction des ressources afin de développer l’économie camerounaise.

La gestion du secteur minier camerounais doit être confiée à des hommes et des femmes intègres, compétents, à des patriotes dont la devise, dans l’exercice de leurs fonctions, est : « Le Cameroun avant tout. »

Dr Bareja Youmssi

Expert en Mine et Pétrole

Enseignant-Chercheur

LAISSER UNE RÉPONSE

Veuillez saisir votre commentaire !
Veuillez saisir votre nom ici