Système de santé

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Le Cameroun au bord du gouffre

La journée mondiale de la santé, célébrée le 7 avril 2025 sous le thème « Une bonne santé à la naissance pour un avenir plein d’espoir », a permis à de nombreux Camerounais d’exprimer leur scepticisme face à la réalité sanitaire dans leur pays.

Dans les grandes métropoles comme dans les localités les plus reculées, la santé demeure un défi majeur au Cameroun. Malgré les discours officiels et les politiques successives, la population continue de souffrir. À cause d’un système de santé jugé défaillant. Le plateau technique des hôpitaux du Cameroun ne sont pas toujours équipés. Il y manque du matériel. Comme le reconnait le Pr Arthur Essomba dans une interview donnée à Cameroun Tribune en 2009. « Nous sommes un pays en voie de développement. Nous n’avons pas les moyens d’y parvenir encore. Je peux même vous dire que dans les pays développés, toutes les régions ne sont pas au même niveau. C’est pour dire que oui, il y a des pathologies qui sont encore au-delà de nos ressources mais heureusement, ce ne sont pas les plus fréquentes ». Seulement le 23 janvier 2025 des triplés nés prématurés à l’hôpital de district de Logbaba dans la ville de Douala décédaient faute de couveuse. Un autre trouvait la mort à l’hôpital régional de Nkongsamba quelques mois avant. Ces faits qui présentent la pauvreté du plateau technique des hôpitaux au Cameroun démontrent une fois encore que des efforts restent à faire dans ce domaine-là. Lors de célébration de la journée mondiale de la Santé le 7 avril 2025 sur le thème « Une bonne santé à la naissance pour un avenir plein d’espoir », les camerounais de diverses couches sociales sont revenus sur la difficulté à se soigner dans ce pays. « Nous avons plusieurs problèmes. Le premier, c’est la disponibilité des experts, qui sont peu nombreux. Ensuite, il y a la rareté des centres sanitaires, surtout dans les zones camerounaises reculées et même des zones centrales du pays. Notre système est véritablement asphyxié par le manque de formations sanitaires dans les périphéries », déplore Dr Guillaume TABLEY, médecin généraliste exerçant dans la ville de Douala. Un seul médecin pour 10 000 habitants. Il évoque au passage la carence des médecins et spécialistes dans les hôpitaux du Cameroun. Ici, on a statistiquement un seul médecin pour 10 000 habitants. « C’est excessif ! Dans les pays développés, l’on compte en centaines. Les gens meurent dans les périphéries parce qu’ils n’ont pas eu la possibilité d’avoir les soins sanitaires pour les maladies que l’on peut bien guérir et tout. Imaginez-vous que même le simple paludisme dans certaines zones au Cameroun fait encore ravage en 2025 », poursuit-il comme pour dénoncer un système de santé encore dérisoire. Ce déficit en personnel s’accompagne d’un manque criard d’infrastructures et de matériel. Une réalité que confirment de nombreux habitants. Angela Nana, commerçante à Douala parle d’un système « néant ». « Dans la majorité des hôpitaux, il n’y a pas les appareils nécessaires pour faire certains examens. Les professionnels, parfois insouciants, ne rassurent pas. Et les examens coûtent tellement cher que les gens préfèrent aller acheter des médicaments dans la rue. », Explique-t-elle. Au-delà de l’absence de moyens, c’est la qualité des soins qui est pointée du doigt. Entre les diagnostics bâclés, les erreurs médicales et le désintérêt du personnel, la confiance des citoyens s’effrite. Maman Angela, a vécu une expérience qu’elle n’est pas prête d’oublier : « Je suis allé faire une injection dans un hôpital et l’infirmière a failli la faire au mauvais endroit. Ce n’est qu’après vérification auprès de sa supérieure qu’elle a reconnu son erreur. Et pour consulter un spécialiste, il faut débourser une fortune. À ce rythme, on a souvent peur quand on va à l’hôpital. » À côté de la carence du plateau technique la cherté des soins de santé est décriée. « Tant que tu n’as pas d’argent, on ne te soigne pas. On laisse les gens mourir. Et dans la ville, il y a des ordures partout. On vit chaque jour dans un environnement qui nous rend malade. Ce n’est pas seulement le gouvernement, nous les citoyens aussi, on a notre part de responsabilité » explique Djoumbi Joël, un jeune travailleur. Reforme. Face à cette situation, les appels à la réforme se multiplient. Pour le médecin interrogé, il est temps que l’État camerounais prenne la pleine mesure de l’urgence : « il faudrait déjà que le gouvernement camerounais considère qu’il nous faut un système de santé assez fort pour pouvoir évoluer sinon on ne peut pas s’en sortir on ne peut pas arriver à avoir une population en bonne santé et une jeunesse dynamique ». En cette Journée mondiale de la santé, les espoirs sont minces mais les attentes sont grandes. Car au-delà des slogans, c’est la vie des Camerounais qui est en jeu.

Ange Kamya

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