Ce que le meeting de Maurice Kamto à Paris révèle sur l’état de la démocratie à Domicile
Le 31 mai 2025, le professeur Maurice Kamto a tenu un grand meeting à Paris une rencontre pacifique, bien organisée et suivie par des Camerounais venus de tous horizons pour écouter, réfléchir et discuter de l’avenir de leur pays.
Dans une démocratie fonctionnelle, un tel rassemblement serait banal. Au Cameroun, il serait tout simplement impensable. Certains cadres du RDPC et figures du régime n’ont pas tardé à critiquer le lieu choisi, à ironiser sur le nombre de participants, à minimiser l’événement.
Mais leur réaction en dit bien plus long sur la fragilité de la démocratie camerounaise que sur le meeting lui-même. Car voici la vérité : Une telle rencontre serait impossible sur le sol camerounais.
1. La dissidence pacifique n’a pas de place au pays
Soyons honnêtes : Si ce meeting avait eu lieu à Douala, Bafoussam ou Yaoundé, il aurait probablement été : Interdit par les autorités administratives, dispersé par les forces antiémeutes, suivi d’arrestations avec des chefs d’accusation tels que « insurrection », « rébellion » ou même « terrorisme ». Au Cameroun aujourd’hui, le droit de réunion pacifique est un luxe réservé à l’étranger. Ce n’est pas le signe d’une démocratie en bonne santé. C’est le symptôme d’un régime qui a peur de son propre peuple.
2. Quand la peur remplace la liberté
Dans une démocratie digne de ce nom, l’opposition politique n’est pas une menace, mais une preuve de vitalité. Au Cameroun, en revanche, la peur a remplacé la liberté. Les citoyens ne se taisent pas par désintérêt, mais par instinct de survie. Ils savent ce qui arrive à ceux qui osent contester le pouvoir : Carrières brisées, familles harcelées, vies détruites ou forcées à l’exil. Cette atmosphère d’intimidation étouffe l’âme même de la participation citoyenne.
3. Le pouvoir de l’action symbolique
Le meeting du Pr. Kamto à Paris n’était pas seulement un événement. C’était un miroir tendu au régime.
Il a démontré que : les Camerounais peuvent s’organiser sans violence, exprimer une opposition ne signifie pas semer le chaos, une autre culture politique est possible basée sur le respect, le dialogue et le courage civique. Et cela, c’est une menace pour ceux qui prospèrent dans le silence. C’est pourquoi le pouvoir a cherché à ridiculiser l’événement : se moquer de la foule, remettre en cause la légitimité, minimiser ce qu’ils ne peuvent plus contrôler le mécontentement grandissant du peuple, au pays comme dans la diaspora.
4. Qui définit la démocratie ?
Quand un prêtre est nommé au conseil électoral par décret présidentiel —
Quand ce même président est chef du parti au pouvoir. Quand les partis d’opposition n’ont aucun poids réel dans l’organisation des scrutins. Quand les candidats indépendants sont arrêtés, bâillonnés ou traînés dans la boue… Peut-on encore parler de démocratie ? La démocratie n’est pas un spectacle. Ce n’est pas un mot. C’est un processus. Et un processus truqué de l’intérieur n’a plus aucune légitimité à l’extérieur.
5. Un électrochoc avant 2025
L’élection présidentielle approche. Les Camerounais doivent se poser les vraies questions : Le prochain scrutin sera-t-il une mascarade de plus ? L’opposition pourra-t-elle réellement concourir ? La voix du peuple sera-t-elle respectée ou réprimée ? Si la démocratie doit s’exiler pour respirer, qu’est-ce que cela dit de notre pays ? Le meeting de Paris n’était pas parfait. Mais il a pu avoir lieu parce qu’il s’est tenu sur une terre libre. Et ce simple fait devrait nous faire réfléchir. Aux aînés au pouvoir : Il est temps de transmettre. Rester éternellement à la tête n’est pas un héritage. C’est un aveu d’échec. Le vrai leadership, c’est aussi préparer la relève, former, transmettre, partir avec dignité. À la jeunesse : Refusez la résignation Ce moment est le vôtre. Exprimez-vous. Organisez-vous. Votez. Ne laissez personne vous dire que votre voix ne compte pas. Elle compte. La démocratie ne se proclame pas. Elle se vit. Tant que les Camerounais ne pourront pas se rassembler, s’exprimer et s’organiser librement, sans peur ni représailles, notre démocratie restera en exil. Et il est grand temps de la ramener chez nous.
Par Adelaide Madiesse Nguela