Issa Tchiroma Bakary

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Le diable et les vertus de la lumière

L’une des plus vieilles autocraties électorales vit dans l’attente des résultats de sa dernière élection présidentielle.

Issa Tchiroma, l’un des adversaires du président sortant, estime avoir remporté le scrutin et promet d’en apporter la preuve dans les jours/heures qui viennent. Face à lui, le gouvernement du président sortant menace et rappelle que seul le Conseil constitutionnel est habilité à déclarer le vainqueur. A mon avis, nous observons les actes préparatoires du sempiternel conflit opposant légitimité et légalité. Le candidat Issa Tchiroma dit disposer de procès-verbaux en quantité suffisante, avec des suffrages majoritairement exprimés en sa faveur et, de ce fait, une tendance irréversible et une victoire inéluctable. En se revendiquant vainqueur, il se drape de la légitimité populaire. Une réalité plus philosophique que juridique, car celle-ci n’a d’effet de droit que si elle est consacrée par le formalisme et les institutions prévues par la constitution. C’est donc une impasse qui ne peut devenir une voie royale que par la pression internationale et la mobilisation du peuple. Le gouvernement sortant, lui, communique peu car le silence est à son avantage. C’est un secret de polichinelle, il contrôle les institutions et a donc beau jeu d’en appeler au strict respect des procédures légales. C’est bien le problème en autocratie : il n’y a pas d’arbitre crédible. Et le pauvre peuple est souvent manipulé par l’un ou l’autre des candidats. Que peut faire le citoyen dans ce cas ? Je pense qu’il faut en appeler à la transparence absolue, quitte à violer la loi car il n’existe pas meilleur antidote à la manipulation. Le «bon diable» Tchiroma a promis de tout mettre en lumière. Il faut l’y encourager fortement. Le peuple est assez mûr pour en juger. C’est le peuple le «vrai» patron. Elecam, si vous voulez confondre le «Diable», ça ne vous coûte rien d’organiser un point de presse quotidien, d’ouvrir grand vos travaux à la presse nationale et internationale et à toutes sortes d’observateurs qui plaideront votre cause, le cas échéant. Vous pouvez même livrer vos propres PV à la connaissance du public. Surtout, ne venez pas me parler de procédures légales. Si vous l’ignoriez, sachez qu’Elecam et même le Conseil constitutionnel, pâtissent d’un grave déficit de confiance. Et aucune entorse de procédure ne vaut la vie d’un seul manifestant en cas de crise post-électorale. Penser le contraire ajouterait un déficit d’humanité au problème de confiance déjà énoncé. Il ne sert donc à rien d’inonder nos smartphones de fake news avec l’intention de «délégitimer» l’un ou de conforter la victoire de l’autre. Mettez vos «vérités» sur la table, convoquez les représentants de toutes les parties prenantes, sortez TOUS LES PV, comptez et recomptez s’il le faut et départagez les candidats en toute transparence. Ça facilitera le travail du Conseil constitutionnel et nous fera l’économie d’un mois d’émeutes meurtrières.

Georges Dougueli

Journaliste à Jeune Afrique

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