Crise post-électorale de l’élection présidentielle du 12 octobre 2025
Déclaration du Redhac No 0043/31/10/2025
Le Réseau des Défenseurs des Droits Humains en Afrique Centrale (RÉDHAC) et sa Coalition pays-Cameroun, en qualité d’observateur auprès de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, suivent de près l’actualité sociopolitique du Cameroun ; en l’occurrence la crise post-électorale qui se poursuit actuellement dans différentes villes du pays.
Le 12 octobre 2025, l’élection présidentielle s’est déroulée sur l’ensemble du territoire national et dans la diaspora dans une atmosphère globalement calme et de sereine. Après la fermeture des bureaux de vote, s’en est suivi immédiatement le dépouillement des bulletins de vote sous le regard des citoyens et des observateurs électoraux. Quelques jours après le scrutin, des mouvements d’humeur et manifestations ont été enregistrés. Nous avons observé à des endroits, des manifestants encadrés par des forces armées républicaines et en général à ces endroits, il y a eu très peu de dégâts matériels et autres. Il faut néanmoins relever pour le déplorer que, quelques jours avant la proclamation des résultats, il y’a eu des nombreux dysfonctionnements et violations des droits humains dans certaines villes du pays ; en l’occurrence : – À Garoua dans la région du Nord, l’utilisation des tireurs d’élite positionnés sur le toit d’une résidence autour de la maison du candidat Issa TCHIROMA ; des affrontements entre éléments de forces de sécurité et les populations civiles ont eu lieu autour du domicile du candidat Issa TCHIROMA Bakary, avec des conséquences énormes : un véhicule de la gendarmerie incendié, de nombreux dégâts matériels et plusieurs blessés ;
– À Makari dans la région de l’Extrême-Nord, le chef d’antenne ELECAM a avoué avoir été corrompu par un commerçant avec la somme de trente millions (30 000 000) FCFA en vue de falsifier les Procès-Verbaux au profit du parti au pouvoir ;
– À Douala, Yaoundé, Garoua et Bafoussam, il y’a eu des arrestations arbitraires, kidnapping et séquestration de certaines figures de l’opposition en violation de toutes les procédures légales. On peut citer : Anicet Ekane (Président du MANIDEM1), Dieukam Tchameni, Titchio Florence (trésorière du MANIDEM), Parfait Mbvoum (militant du SDF), Pr. Jean Calvin Aba’a Oyono enseignant et acteur de la société civile), Abdoul Moussine et Aissatou Oumarou respectivement délégués régionaux du FSNC3 dans les régions du Nord et de l’Ouest. Le 26 octobre 2025, veille de la proclamation des résultats, force a été de constater une répression violente des manifestants pacifiques dans plusieurs villes du pays.
Le 27 octobre 2025, après l’annonce des résultats par le Conseil Constitutionnel, les manifestations sont montées d’un cran dans plusieurs villes du pays entraînant ainsi des casses, pillages, vols, agressions, et incendies de certains édifices publics et des stations-services. Face à cette situation, l’on a pu observer, et ce qui continue d’ailleurs un usage disproportionné de la force par une répression des manifestants de la part des éléments de forces de défense et de sécurité, à travers notamment le matériel de guerre (utilisation des armes létales, des chars de guerre etc.). Depuis le 12 octobre 2025, lors des manifestations pacifiques diverses, le Cameroun a enregistré près d’une quinzaine d’exécutions extrajudiciaires des civils. C’est l’occasion pour le REDHAC et sa Coalition-pays Cameroun d’attirer l’attention de l’opinion publique nationale et internationale des risques d’une escalade qui pourrait dégénérer et aboutir à une spirale de violences dans les prochains jours.
De ce qui précède, le Réseau des Défenseurs des Droits Humains en Afrique Centrale (REDHAC) et sa Coalition pays-Cameroun :
➢ Restent très préoccupés de la situation sociopolitique actuelle du Cameroun marquée par les crises sécuritaires dans plusieurs régions, la montée des discours de haine et les contestations post-électorales ;
➢ Condamnent avec véhémence tout acte de violence d’où qu’il vienne ; ➢ Rejettent en bloc la militarisation du domicile de M. Issa Tchiroma Bakary dans la ville de Garoua à travers notamment la présence des tireurs d’élites ;
➢ Dénoncent les arrestations arbitraires, parfois au faciès contre les originaires de certains groupes ethniques ou de certaines formations politiques ;
➢ S’insurgent contre la restriction de l’espace civique sous prétexte de l’organisation des élections ou des revendications politiques ;
➢ Déplorent le silence de la CEMAC (Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale) et de la CEEAC (Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale) face à la répression violente des manifestations post-électorales.
À cet effet, le Réseau des Défenseurs des Droits Humains en Afrique Centrale (REDHAC) et sa Coalition pays-Cameroun demandent au gouvernement du Cameroun :
➢ De prendre toutes les mesures appropriées visant à éviter une instabilité politique accrue, avec des risques de troubles sociaux et de violences ;
➢ De décrisper le climat sociopolitique actuel en évitant les menaces, intimidations et frustrations susceptibles de dégénérer ;
➢ De libérer sans condition et à l’immédiat, avec l’abandon des charges les nombreux citoyens interpellés par la police le 04 août 2025 devant le Conseil Constitutionnel et ceux interpellés et détenus après la proclamation des résultats y compris les leaders politiques ; ainsi que les observateurs électoraux citoyens arrêtés depuis le 14 Octobre 2025 ;
➢ De garantir la jouissance des libertés individuelles et des droits humains conformément aux instruments juridiques régionaux et internationaux en la matière ;
➢ De démilitariser le domicile de M. Issa Tchiroma Bakary dans la ville de Garoua ; ➢ D’ouvrir une enquête sur les meurtres enregistrés lors des manifestations ; ➢ D’éviter des arrestations au faciès, les kidnappings, les enlèvements et les exécutions sommaires ou extrajudiciaires.
Aux missions diplomatiques des pays accrédités au Cameroun,
Recommandent de veiller à la protection des défenseurs des droits de l’homme.
Aux Nations Unies et à l’Union Africaine (Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples) (CADHP),
Conformément aux instruments africains et internationaux dûment ratifiés par l’Etat du Cameroun notamment la Charte des Nations Unies, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme ; le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques ; la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples ; les principes et directives sur les droits de l’Homme et des Peuples dans la lutte contre le terrorisme en Afrique, le REDHAC et sa Coalition pays
Cameroun :
➢ Demandent de veiller à l’ouverture d’une enquête internationale à l’effet d’identifier et de traduire devant les juridictions compétentes les commanditaires et les auteurs des crimes commis pendant cette crise post-électorale ;
➢ Recommandent de veiller au respect scrupuleux des engagements pris par l’État du Cameroun;
➢ Invitent à soutenir et à accompagner l’action des organisations de défense des droits de l’homme sur le terrain.










