On doit vous contraindre à y retourner
Les hommes cagoulés, la tentative d’enlèvement, les tirs à balles réelles contre des manifestants à mains nues, les arrestations arbitraires et les tortures à quel droit cela correspond-il ? Ou bien ne sommes-nous plus dans le droit ? Et quand on sort du droit, on entre dans quoi ?
Tous ceux qui vous soutiennent peuvent-ils dire dans quoi ils sont désormais engagés ? S’ils ne le savent pas encore, accepteront-ils, une fois qu’on leur dira, d’être complices de cette chose qui n’a plus rien de légal, ni de légitime ? Puisque nous sommes clairement sortis du droit, la question demeure : dans quoi sommes-nous entrés ? Et croyez-vous vraiment qu’on vous laissera y rester ? Jamais. Car lorsque des hommes abandonnent le droit, la seule issue est de les ramener de gré ou de force sur le seul chemin qui vaille : celui du droit. Qu’on ne vous trompe pas : je ne parle pas ici du « droit » de votre Conseil constitutionnel, là où la vérité n’a plus sa place. Pourquoi personne au Cameroun ne réclame l’ouverture d’une enquête or une enquête, ce n’est rien d’autre que la recherche de la vérité. Et puisque même la vérité des urnes n’est plus d’actualité, il n’y a plus ni droit, ni justice, ni vérité. Quand un pays renonce au droit, à la justice et à la vérité, tout en semant la mort, d’autres États n’ont plus le choix que de l’y contraindre. C’est pourquoi je demande qu’une enquête internationale indépendante soit ouverte immédiatement pour établir la vérité sur les exactions en cours. Car la vérité comme celle des urnes ne peut être effacée par ceux qui usurpent la légitimité. Elle demeure la condition même de la justice et de la paix. J’appelle à la mise en place de sanctions ciblées contre les responsables de ces crimes. Ce n’est pas une ingérence. C’est un devoir moral et juridique. Lorsqu’un pays renonce à la vérité, à la justice et s’enferme dans la violence, il appartient aux autres nations de lui rappeler comme elles l’ont fait en Ukraine et à Gaza qu’un tel monde n’est pas acceptable. Je parle ici au nom de tous ceux qui n’ont plus de voix : ceux qui sont morts, emprisonnés, torturés, réduits au silence ou terrifiés à l’idée de disparaître. Le Cameroun ne doit pas devenir un territoire déshumanisé, sans loi ni mémoire. Il est temps que la communauté internationale agisse maintenant pour que les droits de l’homme retrouvent leur place. Il faut d’urgence établir une liste des responsables à sanctionner : interdiction de voyager, gel des avoirs, poursuites à la CPI et, si nécessaire, arrestations. Agir ainsi, c’est affirmer haut et fort que nous refusons de vivre dans un monde fût-il le Cameroun de Paul Biya sans foi ni loi, sans droit ni justice.
Jean Pierre Bekolo Cinéaste










