L’exploitation semi-mécanisée interdite à Kambele
Face aux conséquences désastreuses de l’exploitation minière anarchique, le ministre des Mines décide de prendre des mesures fortes pour assainir le secteur et protéger l’environnement et les populations locales.
Un arrêté du ministre des Mines et du Développement technologique, daté du 13 août dernier, interdit toute activité de recherche, d’exploitation industrielle et d’exploitation artisanale semi-mécanisée à l’intérieur du périmètre de recherche minière 643 dénommé Batouri. Jusqu’ici, les conséquences de cette exploitation se sont avérées lourdes et négatives, comme le rappelle le Centre de recherche international en recherche agronomique pour le développement (Cirad), qui a mené une étude dans cette région. « L’exploitation illégale et non réglementée. Une grande partie de l’activité dans la région est illégale et informelle. De nombreuses entreprises, dont des sociétés chinoises, opèrent sans respecter la législation en vigueur, des arrêtés préfectoraux et des décisions de justice ordonnant la cessation de leurs activités. En octobre 2024, le ministre des Mines du Cameroun a d’ailleurs suspendu une dizaine de sociétés à Batouri pour ces raisons », affirme le rapport du Cirad. Cette exploitation minière a des conséquences désastreuses pour l’environnement et les populations locales : pollution de l’eau, utilisation de produits chimiques toxiques comme le mercure et le cyanure pour l’extraction de l’or, entraînant la pollution des cours d’eau. Les études ont montré que ces eaux sont chargées en chlorure de calcium et en sulfate de calcium. La dégradation des sols et des terres est également une conséquence de l’activité minière, qui détruit les plantations et les espaces agricoles souvent sans dédommagement pour les populations. Les sites abandonnés se transforment en trous de la mort non réhabilités, représentant un danger constant d’accident et d’éboulement. Les problèmes de santé ne sont pas en reste ; les mineurs et les communautés environnantes sont exposés à des risques sanitaires importants. Les maladies les plus fréquentes sont la silicose, les dermatoses, les infections pulmonaires, ainsi que les maladies hydriques comme la typhoïde, la diarrhée et les hernies, dues à la dureté du travail et à l’inhalation de poussières. Les conditions de travail dans les mines de Batouri sont difficiles et dangereuses. Les mineurs, y compris les enfants réfugiés centrafricains, travaillent sans équipements de protection individuelle, malgré l’interdiction formelle du travail des enfants sur les sites miniers depuis 2021. La pratique persiste, et les salaires sont très bas pour la plupart des ouvriers. Les autorités camerounaises tentent de faire face à cette situation. Le ministre des Mines, à travers le cadre d’appui aux artisans miniers (Apam), a essayé d’organiser et de formaliser le secteur artisanal. Des ONG comme Foder et le Centre pour l’environnement et le développement dénoncent très souvent les abus et la violation des droits de l’Homme, plaidant pour un renforcement des contrôles et des sanctions contre les entreprises illégales. Désormais, seules les activités d’exploitation artisanale sont autorisées dans le périmètre d’exploitation du permis 643 à Kambele. Mieux encore, le périmètre d’exploitation a été révoqué et est dorénavant rattaché au domaine de l’État. Ce qui suscite de la satisfaction pour les autorités traditionnelles de la localité. « Il a remis nos terres, il nous a remis nos ressources et nous sommes contents », se satisfait Moïse Damboura, chef de 2ème degré de Kambele. Cependant, la colère de certains riverains est jugée incompréhensible. « Qui font du mouvement, qui signifient leur mécontentement, sont des égoïstes. Ils protègent juste leurs intérêts. Il y a des gens qui ont 50, 60 hectares… Quand vous voyez bien, les populations n’ont rien », regrette Pierre Timbagobo, conseiller régional. Avec ces mesures, c’est certainement une nouvelle page qui s’ouvre dans l’exploitation minière.
Stéphane Antoine Ayissi














